Les portefeuilles numériques de compétences dans le changement organisationnel à l’université – Thèse de Romain Trillard

Cette recherche est articulée autour des «Portefeuilles Numériques de Compétences » (PNC) et vise à comprendre pourquoi est-ce que ces technologies s’intègrent difficilement aux universités en prenant le cas d’une institution volontaire dans la conduite du changement et dont la trajectoire est emblématique des évolutions rencontrées par les organisations académiques.

Plus précisément, la thèse montre de quelle manière des objets sociotechniques, les « PNC », traduisent et incarnent les mutations qui traversent l’Enseignement Supérieur et de la Recherche (ESR), grâce aux témoignages d’une vingtaine d’acteurs et des documents. Pour structurer notre analyse, nous mobilisons le cadre des Approches Communicationnelles des Organisations (ACO) tel qu’il a été formalisé par les travaux de Jean-Luc Bouillon, Catherine Loneux, Sylvie Bourdin.

Ainsi, notre approche consiste d’abord à caractériser les « PNC » ou « e-portfolios » et à les replacer dans le cadre des rationalisations organisationnelles et politiques portées par l’idéologie de l’« économie et de la société de la connaissance ». Pour faciliter ce travail, nous prenons appui sur les travaux de Pierre Moeglin et des chercheurs mobilisés sur la question de « l’industrialisation de la formation » dans les années 1990.

Nous montrons notamment en quoi le développement des « PNC » est une déclinaison contemporaine des logiques déjà soulignées par ce groupe de travail ; et donc en quoi ces dispositifs sont un symbole de l’accélération des rationalisations organisationnelles et politiques engendrées par la mise en place des réformes européennes et des transformations de l’État : LMD (2002), LOLF (2007), Révision Générale des Politiques Publiques (RGPP) (2008), loi relative aux Libertés et Responsabilités des Universités (LRU) (2008), passage aux Responsabilités et Compétences Élargies (RCE) (2008) et COMUE (2013). Nos travaux entrent ainsi en résonance avec ceux d’enseignants-chercheurs français comme Christine Barats, Anni Vinokur, Yves Chevalier et Vincent de Gaulejac ainsi que des travaux internationaux comme ceux de Sheila Slaughter et Gary Rhoades.

Ensuite, nous avons été amené à resituer la notion d’ « université ». Nous prenons appui, de manière théorique, sur les travaux de l’économiste Laurent Thévenot, du professeur en Sciences de l’Information et de la Communication (SIC), Christian Le Möenne et des sociologues néo-institutionnalistes Walter Powell, Paul Di Maggio, François Dubet et Salvador Juan. Nous délimitons des dimensions sémio-juridique, organisationnelle et conventionnelle des activités. Pour alimenter ces catégories, nous recourons à des travaux spécifiques aux universités (Christophe Charles, Yves Gingras, Christine Musselin…).

Ce double travail nous permet alors de positionner un cadre à l’intérieur duquel nous pouvons analyser les raisons du non-usage des « PNC », en suivant une méthode info-communicationnelle d’analyse de l’activité inspirée par les travaux des chercheurs en SIC, comme Pierre Delcambre, François Cooren et Gino Grammacia.

Trillard, Romain (2016). Une approche info-communicationnelle du changement organisationnel à l’université : autour des portefeuilles numériques de compétences. Sciences de l’information et de la communication. Université Rennes 2, 2016. Document téléaccéssible sur HAL Id: tel-01501930 :  https://tel.archives-ouvertes.fr/tel-01501930